Il fallait que je vous parle de la machine de Mar.
Mar, mon tailleur, silhouette dégingandée aux yeux rieurs et au large sourire, est d'une humilité qui force le respect, mais assis derrière sa machine, ses gestes lents et assurés suscitent l'admiration du néophyte.
Un furtif coup d'oeil sur l'antre de Mar vous dira quel genre de tailleur il est. Son atelier est à l'image de sa couture: nette et disciplinée.
L'indispensable ventilateur, un sol décoré par quelques lamelles de tissu éparses, qu'on croirait méticuleusement découpées, une pile de travaux en cours sagement pliés sur le côté et une Pfaff désuète, usée par l'expérience, trônant fièrement sur une table style années 70.
Elle est assortie de deux portes-bobines en bronze aux allures de plateaux de balance, que vient justement coiffer le chapelet du pieux, censé conjurer le mauvais sort et convoquer une myriade de bienfaits. Ils sont eux-mêmes surmontés de deux crochets élégamment incurvés, que le fil traverse pour finir sa course dans la machine.
Certainement une énième et astucieuse réinterprétation inédite du porte-bobine. Mais Mar infirme: le système est d'origine.
Pour le reste, vous dessinerez et Mar donnera vie à la moindre de vos idées. Mais il écoute d'abord, dans un silence rompu par des acquiescements fréquents de la tête, comme pour s'imprégner de votre vision avant de s'exécuter, en veillant à objecter ou à agréer à point nommé, lorsqu'il s'agira de la longueur d'une pièce par exemple ou d'un détail dont la fantaisie aura ravivé sa soif d'innover.
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